Les Troubles du Comportement Alimentaire

Décrits également par le terme TCA, les troubles du comportement alimentaire sont des maladies à part entière, ayant une composante psychologique importante, et induisant des comportements, attitudes et réactions problématiques vis à vis de l'alimentation et de la nourriture, concernant à la fois la personne malade (qui en souffre profondément), mais également son entourage (qui ne sait comment intervenir, et qui pense même parfois être la cause du TCA). Le comportement alimentaire étant à la fois la façon de manger, mais aussi la façon dont on y pense, les troubles du comportement alimentaire portent sur ces deux aspects.

Les TCA les plus connus sont sans nul doute les anorexies et les boulimies, mais il en existe d'autre, comme les restrictions alimentaires, les compulsions, les hyperphagies, et les orthorexies.

Les troubles du comportement alimentaire se détectent lorsque l'alimentation et la nourriture deviennent la préoccupation majeure et constante d'une personne, qu'elles occupent ses pensées continuellement, et qu'elles guident sa façon de vivre.

D'autres facteurs peuvent évoquer des TCA : des pertes ou des prises de poids assez conséquentes, des attitudes d'isolement, de repli sur soi.

Les facteurs déclenchants des troubles du comportement alimentaires sont multiples et encore peu connus, mais des analogies ont été établies chez les personnes souffrant de ces maladies. On retrouve en effet fréquemment (mais pas toujours non plus!) des problèmes d'estime de soi, une extrême sensibilité, des difficultés à communiquer avec les autres et à exprimer ses émotions (notamment au sein de la famille).

Notons également que ces pathologies se développent plus volontiers dans nos sociétés occidentales, où l'image du corps est magnifiée et l'idéal de minceur poussé à son paroxysme, dans le lien que l'on fait entre performance et beau corps.
Enfin, ces pathologies atteignent plus particulièrement les adolescents (mais pas exclusivement).

Les troubles du comportement alimentaire sont des maladies graves, qui peuvent être mortelles.

 

Une véritable urgence psychologique

Le trouble est un symptôme, qui parle du mal être sans le nommer. C'est l'arbre qui cache la fôret. En ce sens, on peut dire que le symptôme vise à résoudre une souffrance devenue insupportable sans porter atteinte aux contrats inconscients.

Ce symptôme se révélant destructeur pour la santé de la personne qui en souffre, il importe que cette personne trouve d’autres façons de manifester sa souffrance.

Elle a souvent besoin de se faire accompagner pour cela car dénouer le symptôme n'est en aucun cas une question de volonté : cela signifie affronter une grande souffrance et dénouer des loyautés anciennes inconscientes ou non.

La « guérison » intervient après un processus long et difficile qui va solliciter profondément la personne, remettre en question son rapport au monde et donc à son entourage. 

L'objectif de la thérapie est d'accompagner l’individu vers une appropriation simultanée de son corps, de sa psyché et de son esprit : s’interroger sur son désir, le reconnaître, affirmer ses besoins, poser les bases de son identité, faire la paix avec son corps et se sentir en sécurité dans son enveloppe, apprivoiser ses émotions, être « une bonne mère » pour soi, retrouver l’amour de soi même...finalement « ETRE ».

 

Qu'est-ce que la boulimie

Cette maladie touche principalement des femmes (1 homme pour 9 femmes en proportion), dans une tranche d'âge un peu plus élevés que pour l'anorexie (20-25 ans en moyenne).

La boulimie peut être décrite comme une suite d'épisodes d'hyperphagie (pendant lesquels le sentiment de "perte de contrôle" sur l'alimentation prédomine) suivis d'épisodes de purges (vomissements, restrictions alimentaires, pratique excessive d’activité physique ou encore usage de laxatifs de diurétiques ou autres coupe-faim). Ces épisodes de purge étant sous-tendus par la volonté de ne pas prendre de poids. Le contrôle du poids devient le centre de toutes leurs préoccupations.

Les boulimiques « ne pensent qu’à ça », du soir au matin c'est l'obsession de la "bouffe".

Même si les boulimiques se rendent bien compte du caractère anormal de leur comportement, elles ne peuvent s’empêcher de manger, elles essayent de se retenir, mais finissent par craquer et se jeter sur la nourriture comme un toxicomane en pleine crise de manque ; c’est une maladie de la dépendance, de l’addiction. 

Le lien avec la toxicomanie est d’autant plus saisissant que les boulimiques sentent bien que c’est « au-dessus de leur force », « au-delà de leur volonté », « c’est plus fort qu’elles », elles ont un besoin impérieux de manger, d’avaler, d’ingurgiter parfois tout et n’importe quoi. Comme les drogués, elles ne peuvent pas se passer de « la bouffe ».

La crise est redoutée par la personne boulimique, mais lorsqu'elle se déroule, c'est un moment d'intense satisfaction. Une fois la crise passée elles sont prises de remords, de honte, de culpabilité et d’une grande tristesse ; elles se jurent de ne plus recommencer.

Le plaisir de manger est bien souvent absent dans ces crises, c’est une terrible angoisse qui monte, une tension indicible et lancinante qui ne trouvera l’illusion du soulagement que dans l’assouvissement de la pulsion.

Même si en théorie les personnes atteintes de ces troubles ont tout pour être heureuses, et qu’en apparence ce sont des personnes brillantes, souriantes, généreuses, leur vie est un cauchemar ! Les personnes souffrant de boulimie vivent un enfer, elles se sentent terriblement mal dans leur peau, elles ont peur de tout, se sentent vides ; toute leur vie est articulée autour du regard des autres.

En réalité, ce sont des personnes qui n'ont pas confiance en elles, qui cherchent continuellement à être bien considérées par leur entourage, mais qui comprennent très bien l'ambiguïté de la situation, du "mensonge" dans lequel elle vivent : elles donnent à voir une personne qui n'est pas elles! D'où des moments de conflit internes, des sentiments, des colères qu'elles n'expriment qu'au travers de la crise boulimique. Celle-ci peut se déclencher suite à un changement, parfois minime, mais qu'elles ne maîtrisent pas. Cette crise est en général amplifiée par les restrictions alimentaires précédentes, restrictions initiées dans l'optique de perdre du poids; d'ailleurs, les aliments consommés pendant les crises de boulimie sont très souvent des aliments très riches sur le plan énergétique, ou des aliments "interdits" si l'on veut perdre du poids.

Tout devient alors difficile, compliqué et est source d’angoisse : aller travailler, faire des études, avoir une relation sentimentale et parfois même sortir dans la rue.

La boulimie est comme « une invalidité sociale et affective », être « juste bien » semble impossible.

Il est très difficile de "remarquer" la maladie, car les personnes qui en souffrent n'ont pas de réels problèmes de poids, n'évitent pas l'alimentation et les repas, et les crises se déroulent bien évidemment en cachette.

Parallèlement à ces symptômes alimentaires, d’autres « caractéristiques » plus pernicieuses se mettent en place:

L’humeur instable, l’hypersensibilité, la susceptibilité, la politique du « tout ou rien », les sentiments contradictoires, le manque de confiance en soi, la dévalorisation, la dépression, l’isolement, la culpabilité, l’agressivité, la parano… Ce sont des troubles de la relation à soi et de la relation à l’autre. 

Toutefois, cette relation infernale avec la nourriture n’est qu’un symptôme, c’est l’arbre qui cache la forêt, la face cachée d’une vie faite d’angoisses, de tortures et d’accusations.

Être obsédée par la « bouffe », contrôler son apport calorique, se faire vomir, se peser tous les jours est une façon de « déplacer » le problème, concentrer son énergie sur autre chose que soi et éviter d’être en contact avec ses désirs et ses besoins. 

« Bouffer » devient une régression défensive contre les stimuli extérieurs et intérieurs, un moyen de s’apaiser, de compenser, d’étouffer ses émotions, de combler le vide, une façon d’exprimer un profond sentiment d’abandon sous les apparences du défi, un mélange exaspéré de soumission et de révolte, un système qui remplace le « Moi » et neutralise les angoisses.

Face à une telle souffrance psychique, il ne reste plus que son propre corps comme moyen d’expression et de contrôle.

 

Qu'est-ce que l'anorexie

Il existe plusieurs définitions de l'anorexie mentale. Toutes ont en commun le fait que l'anorexique a peur d'être grosse ou de devenir grosse, qu'elle se voit perpétuellement en surpoids voire obèse. L'image qu'elle a d'elle même et de son corps est fortement perturbée.

Anorexie veut dire "sans appétit", ce qui signifie que l'un des mécanismes par lequel l'anorexique va réagir est de se priver de manger, afin de ne pas grossir, voire de maigrir. L'anorexie peut conduire au décès du patient, par dénutrition. Les symptômes physiques de l'anorexie sont bien évidemment un amaigrissement spectaculaire, une aménorrhée (absence de règles, liée à l'état physique de la patiente), une hyperactivité physique (en début de maladie).

L'anorexie touche majoritairement des jeunes filles (un jeune homme pour 9 filles), à l'époque de l'adolescence, période de la vie importante en terme de changements, tant physiques que psychologiques.

Tous les anorexiques ont en commun une estime de soi assez faible, un manque de confiance (qui les laisse penser que tout va échouer), corrélé paradoxalement à un amour propre démesuré : ainsi, le fait d'être capable de contrôler leur corps les rassure. Ce sont également en général des personnes qui ont beaucoup de mal à exprimer leurs émotions verbalement, elles les expriment donc par le biais de leur corps.

Par ailleurs, plusieurs hypothèses sont posées pour comprendre le mécanisme de pensée des anorexiques :

  • ne pas manger est un moyen d'attirer l'attention des autres sur soi, pour sentir que l'on existe (puisque l'anorexique a le sentiment qu'elle ne compte pas)
  • penser continuellement à l'alimentation permet de ne pas penser au reste
  • notre société valorise continuellement la minceur, en gommant les attributs physiques de la féminité (au niveau des hanches notamment), ce qui peut conforter l'anorexique dans son désir de maigreur; cela dit, les anorexiques existent depuis des siècles, à des époques même où les rondeurs de la femme étaient valorisées
  • la maladie apporte quelque chose, c'est pourquoi il est si difficile d'en sortir : l'anorexique est forte vis à vis de l'alimentation, elle résiste. Être malade (ne pas manger) devient un signe de force, et non de faiblesse

Enfin, on sait qu'il existe un lien fort entre l'acte, le fait de manger, et l'amour : chez le bébé, le tryptique "faim (le bébé pleure) - amour (sa maman, qui l'aime, lui donne à manger) - rassasiement (le bébé n'a plus faim, il se sent bien)" est bien connu, et il se prolonge sans aucun doute tout au long de la vie.

Amour et stratégie alimentaire sont donc en lien : chez l'anorexique, ce lien-là est certainement exacerbé (ne plus manger pour être plus aimer, ou ne plus manger car on n'est plus aimé...)

 

Qu'est-ce que l'hyperphagie

L'hyperphagie est un syndrome qui consiste en des prises alimentaires très importantes sur le plan de la quantité : les personnes hyperphages sont capables de manger des quantité de nourriture impressionnantes.

Cette caractéristique s'accompagne d'autres critères pour définir l'hyperphagie :

  • les prises alimentaires sont particulièrement rapides
  • elles se font jusqu'à ce qu'un certain inconfort digestif se développe
  • la personne hyperphage a l'impression qu'elle ne pourra pas s'arrêter, il n'y a pas de contrôle possible à ces prises alimentaires
  • elle se sent mal et déroutée d'avoir tant manger
  • ce type de prise alimentaire a lieu sans sensation de faim
  • il n'y a pas de phénomènes de compensation de la prise alimentaire (à l'inverse de la boulimie, lorsque le malade se fait vomir pour "évacuer" la prise alimentaire")
  • les personnes atteintes d'hyperphagie sont en vraie souffrance, elles mangent souvent en solitaire, pour ne pas être vues, car elles sont pleinement conscientes que leur comportement alimentaire est aberrant, mais elles ne peuvent aller contre.

Quelqu'un qui mangerait en quantité plus importante que ses collègues ou amis n'est donc pas nécessairement hyperphage!
D'autant que les personnes hyperphages sont en général en surpoids, voire obèses, et très mal dans leur peau.

Il existe une déclinaison de l'hyperphagie, lorsque celle-ci se produit exclusivement la nuit, on parle alors d'hyperphagie nocturne : la prise alimentaire est nécessaire pour permettre à l'individu de se rendormir, et celui-ci ne se souvient plus très bien de ce qu'il a mangé pendant ce moment-là. Il semblerait que ce type de comportement soit lié à une attention très marquée sur l'alimentation tout au long de la journée (la personne se contrôle), mais ce contrôle est inhibé la nuit, et le relâchement produit une surconsommation alimentaire.